Juliette : Aujourd’hui, c’est le premier épisode de la boîte à outils des parents qui est un peu différent de d’habitude. J’ai une invitée ! Je reçois Mélanie Courrière qui a créé, entre autres, le blog « Faire découvrir l’écologie aux enfants ».
Mélanie, je suis ravie de te recevoir sur le podcast la Boîte à outils des parents.
Dis-nous qui tu es ?
Mélanie : Bonjour Juliette, bonjour tout le monde. Alors, déjà, Juliette, merci de me recevoir sur ton joli podcast. Moi c’est Mélanie, je suis maman de deux enfants. J’ai eu une véritable prise de conscience écologique à leur naissance. A ce moment-là, certaines remises en question ont été assez brutales.
On a essayé de mettre en place pas mal de changements dans notre façon de consommer. Je me suis pas mal questionnée sur le modèle que j’offrais à mes enfants. J’étais en quête de sens aussi dans ma vie professionnelle. Je me suis rendu compte que j’avais des difficultés à trouver les mots justes pour parler de problématiques environnementales sans les angoisser. C’est là que j’ai donné un tournant à ma vie. J’ai tout quitté pendant le confinement. Je me suis formée pour créer les outils que j’aurais aimé trouver pour les sensibiliser avec bienveillance et surtout en s’amusant !
Aujourd’hui, ma mission dans la vie, c’est de fournir aux parents et aux enseignants les clés pour accompagner les enfants dans la construction d’un monde durable, dans la bienveillance et en s’amusant !
Juliette :
Pourquoi est-ce si important de sensibiliser nos enfants à la protection de l’environnement ?
Mélanie : On va commencer avec des chiffres que je trouve alarmants et après, je vais vous donner des chiffres qui vont être plus rassurants :
- pour faire un électrochoc, en un siècle et demi, la température à la surface de la terre a augmenté de 1,2°C. Ça peut paraitre dérisoire mais c’est beaucoup car ça bouleverse tout l’équilibre qu’on a sur la planète.
- Un autre chiffre un peu choc : il y a eu 8,7 millions de personnes tuées par la pollution de l’air en 2018 dans le monde. C’est énorme, rien qu’avec les problèmes respiratoires…
- Dans l’océan aussi, ça c’est quelque chose qui parle beaucoup aux enfants et aux parents, il y a 5 000 milliards de morceaux de plastique, sachant qu’on génère encore des tonnes et des tonnes de déchets dans les océans, aujourd’hui.
Juliette : C’est un chiffre tellement gros que je ne sais pas à quoi ça correspond !
Mélanie : On n’arrive même pas à se le représenter. Mais c’est énorme et c’est un chiffre qui tend à diminuer mais qui ne diminue pas encore terriblement. Et ça, ça a bouleversé beaucoup de choses, dont des problématiques sur des espèces vivantes.
- 1 espèce vivante sur 8 (animale ou végétale) est menacée d’extinction imminente. Donc, ça veut dire qu’il reste peu d’individus dans les populations. Donc ça, ça touche beaucoup les enfants. C’est quelque chose qui leur parle et c’est un chiffre qui est plutôt alarmant aujourd’hui.
- Alors un dernier chiffre selon l’ONU, 5 milliards de personnes pourraient connaître des difficultés d’accès à l’eau en 2050. Alors, 2050, ça nous parait super loin. Il y a plein de personnes qui me disent « je me sens presque pas concerné.e ». Mais, pour raisonner à mon échelle, en 2050, ma fille aura l’âge que j’ai aujourd’hui. Elle sera en plein dans la construction de sa vie. Nous, on a des problématiques environnementales qui nous touchent mais elle, aura des problématiques environnementales plus sérieuses et plus graves, si on ne fait rien en tout cas, et si on ne les sensibilise pas dès aujourd’hui.
J’ai paniqué tout le monde avec des chiffres un peu alarmants mais c’est exprès, c’est pour interpeller. Mais, il y a aussi des données encourageantes qui sont rassurantes. Par exemple :
- On a remarqué qu’en trente ans, depuis les années 90, on en parle quand même de plus en plus, on a beaucoup parlé des gaz à effet de serre. En trente ans, il y a -28 % d’émissions de gaz à effet de serre. C’est quelque chose qui est hyper rassurant ! On a beaucoup parlé du trou dans la couche d’ozone qui s’est résorbé de lui-même. Ça montre que lorsqu’on passe à l’action, on peut faire évoluer les choses et que les choses changent.
- Un autre chiffre : 19 % de notre consommation d’énergie provient d’une source renouvelable. Ça montre que les modes de vie évoluent petit à petit. C’est un chiffre qui est en constante évolution.
- Il y a 75 % de pistes cyclables en plus depuis ces dernières années. Ça montre qu’on essaye de pousser les gens à utiliser de plus en plus les vélos plutôt que la voiture.
- On a plus de 80 % de collectes sélectives depuis 2000.
On voit que les habitudes changent, et ça, c’est une super bonne nouvelle. Les actions se mettent en place et portent leurs fruits. C’est encourageant : il faut continuer sur cette piste-là et ça montre que quand on veut, on peut !
Tout ça pour répondre à ta question initiale, Juliette, « pourquoi c’est si important de sensibiliser nos enfants si tôt ? » : c’est que c’est leur génération qui va être décisive sur l’avenir de la planète. Et, ça va vraiment l’être ! Et déjà, nous, en tant que parent, nous avons un rôle à jouer pour commencer à les sensibiliser pour que, quand ils auront l’âge de prendre des décisions, ils aient les clés en main pour le faire.
Juliette : J’ai froid dans le dos !
Comment ne pas tomber dans l’anxiété ? Et comment faire en sorte que nos enfants ne deviennent pas anxieux par rapport à tout ça ?
Mélanie : L’éco-anxiété est un sujet super vaste. Je vais essayer d’être brève.
L’éco-anxiété est un état normal. C’est un état qui nous prouve qu’on a conscience. On entre en conscience de ces problématiques environnementales et c’est une bonne chose.
Il faut faire la différence entre l’éco-anxiété qui va nous pousser à l’action et qui est donc bénéfique et l’éco-anxiété qui va devenir pathologique et qui va, au contraire, freiner nos actions et produire l’effet inverse de ce qu’on cherche. Il faut faire attention à ça.
Je suis persuadée que l’éco-anxiété va avoir un rôle sur notre bien-être. Par exemple, pour l’homme des cavernes, l’anxiété a eu un rôle sur son évolution puisque quand il s’est rendu compte qu’il était en présence de bêtes sauvages, il a mis en place des moyens pour lutter contre ça (le feu et les moyens défensifs) et son anxiété l’a aidé à se protéger et à mettre des actions en place.
Pour moi, l’éco-anxiété a le même rôle.
« Comment ne pas tomber dans l’éco-anxiété ? » :
Pour les plus jeunes, il ne va pas falloir créer d’anxiété, mais aborder cette thématique avec bienveillance, sous l’axe du jeu. C’est beaucoup ce que je fais avec les miens. Il y a plein de moyens pour sensibiliser nos enfants dans la bienveillance : leur apporter des informations claires et adaptées à leur âge, il y a des choses que les enfants sont de toute façon trop jeunes pour comprendre et qu’il faudra aborder plus tard.
Les sensibiliser au quotidien avec des petites activités. Quand on crée quelque chose avec un emballage, c’est déjà un geste pour la planète car c’est un objet neuf qu’on ne consomme pas. Il y a plein de petites choses qu’on peut mettre en place comme ça et qui sont super simples.
Avec les plus âgés, quand ils vont ressentir ce sentiment d’éco-anxiété : ils vont se rendre compte qu’on est à la fois victime et coupable. C’est super dur mais il va falloir les rassurer, leur dire que c’est normal de traverser ces émotions-là. Et puis aussi de les apaiser : en apprenant à comprendre pourquoi, et comment lutter contre ça, ils vont devenir acteurs et ils vont eux-mêmes lutter contre leur éco-anxiété car ils vont être acteurs de leur vie.
Juliette :
Comment, nous parents, peut-on aborder le sujet de l’écologie et de la préservation de l’environnement avec nos enfants ? Parce qu’après tout, ils sont petits, ils ne comprennent pas forcément tout…
Mélanie : Déjà, il faut qu’ils en aient conscience parce que quand on est tout petit, on est hyper égocentré. On ne voit que soi et son monde proche. Il va donc falloir prendre conscience de notre existence et du monde vivant qui nous entoure. Et puis, je vous le disais tout à l’heure : apporter des informations claires et adaptées à l’âge des enfants est capital ainsi que nuancer leur responsabilité.
Et par exemple, d’aller faire une balade en forêt et observer, écouter, comprendre par soi-même ou avec des livres. C’est un très grand pas pour parler d’écologie à nos enfants sans qu’ils s’en rendent compte.
Juliette : En fait, c’est avec des moyens qui sont à notre portée facilement et quasiment quotidiennement.
Mélanie : Oui car quand on fait du tri sélectif, on ne l’explique pas à nos enfants mais c’est déjà un geste. Quand on va en forêt, juste le fait d’observer les arbres… Mon fils, à une époque, voulait arracher les feuilles des arbres… Juste lui expliquer. Ça c’est tout simple !
Juliette : Oui, c’est vrai !
On demande beaucoup de choses à nos enfants, comment ne pas être toujours sur leur dos avec cette préoccupation en plus ? Comment faire en sorte que l’écologie ce soit fun et que nos enfants aient envie de faire des efforts pour protéger l’environnement ?
Mélanie : Je suis convaincue que la clé pour leur parler de problématiques graves, pas forcément d’environnement et d’écologie mais de toutes les problématiques, c’est le jeu.
Il va falloir leur apporter des choses de façon ludique voire détournée. Apprendre à comprendre, ça ne se fait pas forcément derrière un livre super strict. On peut le faire via plein de choses, par exemple des balades en extérieur, des jeux, etc.
Voici des idées d’activités :
1. Une expérience scientifique toute bête pour comprendre l’effet de serre, que j’ai découverte avec mes enfants et qui a révolutionné plein de choses : prendre deux verres d’eau, avec la même eau, à la même température. On les met au soleil. Sur l’un de ces verres d’eau, on place un saladier en verre ou on le recouvre avec quelque chose. On laisse ces verres d’eau au soleil une ou deux heures. On va revenir après et enlever le saladier et on va demander à notre/nos enfant.s de mettre leur doigt dedans. Et là, ils vont constater que les deux verres d’eau n’ont pas la même température. Pourtant, ils étaient au soleil tous les deux, ils étaient juste à côté. Ils vont se rendre compte que le verre d’eau sur lequel était le saladier va avoir une eau avec une température qui est plus élevée (qu’on peut sentir facilement). On pourra ainsi leur expliquer l’effet de serre : la pollution qui fait l’effet de serre et qui va contenir la chaleur autour de la Terre. On arrive ainsi à se représenter l’augmentation de la température à la surface de la Terre. C’est une expérience toute bête, hyper parlante avec des choses simples que l’on a à la maison.
2. Faire une chasse aux couleurs dans la forêt ou quand on va se balader avec les enfants. On prend une boîte d’oeuf. On colorie le fond avec des couleurs. On va en forêt et on essaye de trouver un élément qui correspond à chaque couleur. Ils vont se rendre compte de la biodiversité de la nature qui est hyper riche et qu’il faut protéger. Le but n’est pas d’arracher mais juste d’observer les couleurs. C’est une activité toute bête qui plait beaucoup aux enfants et aux parents.
3. Lire des livres, tout simplement. C’est tout bête mais aujourd’hui, il y a énormément de livres qui abordent cette thématique-là.
4. Des activités d’upcycling : les enfants aiment beaucoup les activités manuelles donc souvent, on se précipite dans les boutiques pour acheter plein de matériel. En fait, du matériel, on n’en a pas besoin. Par exemple, en ce moment, c’est la mode des cartes à gratter. On récupère un emballage de paquet de gâteaux ou de céréales. On prend le côté cartonné ou le côté plastifié, vernis, avec de la couleur en dessous. S’il n’y a pas assez de couleurs, prenez le côté cartonné et recouvrez la surface avec des pastels gras. Ensuite, on va faire un petit mélange magique : 3 doses de peinture + 1 dose de liquide vaisselle. On mélange tout, on tartine notre support cartonné avec cette peinture. On laisse reposer quelques heures et quand c’est sec, on vient gratter avec un petit bâton, un petit truc un peu pointu et ça fait l’équivalent d’une carte à gratter. Ça marche hyper bien ! L’effet est le même que ce qu’on achète dans le commerce. On leur explique que le fait de faire soi-même est un geste pour la planète car c’est un emballage qu’on aurait jeté dans la poubelle de recyclage qui ressert, qui a une deuxième vie et en plus, ça évite qu’on aille acheter quelque chose dans le commerce qui a fait tourner des usines, qui a produit des emballages, etc.
5. Observer les petites bêtes : essayer de comprendre que les vers de terre, il ne faut pas les écraser car ils aèrent la terre. Les araignées sont des régulateurs de population d’insectes. S’il n’y avait pas les araignées, il y aurait beaucoup plus d’autres insectes (les moustiques ou d’autres qui sont embêtants). Et finalement, les araignées, il ne faut pas les écraser, il faut les laisser vivre !
Juliette : Oui mais alors quand elles sont à la maison… Je trouve qu’elles devraient vivre dehors !
Mélanie : A ce moment-là, il ne faut pas l’écraser, il faut la prendre et la mettre sur le rebord de la fenêtre.
Juliette : Pas toujours évident !
Mélanie : Oui voilà, je comprends. Mais, les araignées sont hyper importantes. Et il y a plein de choses comme ça. Les abeilles, en ce moment, on parle beaucoup des abeilles. C’est passionnant à observer et leur rôle est aussi fondamental dans les écosystèmes !
6. On en parlait tout à l’heure : prendre le vélo plutôt que la voiture. Les enfants, ça les éclate d’aller à l’école en vélo. C’est déjà un super geste ! Et leur expliquer pourquoi.
7. Et puis, aller à la ferme, cueillir des fruits et légumes de saison et leur expliquer pourquoi les légumes de saison qui sont produits localement… C’est important.
Ce sont des activités toutes bêtes qui sont hyper importantes et qui leur apprennent beaucoup de choses.
Juliette : Et toi, tu as créé un abonnement… Explique-nous un peu, tu en parleras beaucoup mieux que moi !
Mélanie : Quand j’ai eu ma prise de conscience écologique avec mes enfants, j’étais à la recherche de solutions toutes faites que je n’ai pas trouvées, qui n’existaient pas à l’époque. Et aujourd’hui, maintenant que je suis lancée dans cette activité-là, ce qu’on me dit souvent, c’est que les parents, et même les enseignants ont envie de parler de ça avec leurs enfants mais ils ne savent pas comment faire. Ils n’ont pas le temps et pas toujours les connaissances. C’était mon cas il y a quelques années.
J’ai créé les outils que j’aurais voulu trouver il y a quelques années.
Dans un premier temps, j’ai lancé mon blog qui regorge de pas mal de choses quand on veut se lancer avec ses enfants dans des activités, des explications ludiques et simples.
Il y a quelques mois, j’ai créé une offre beaucoup plus structurée, sous forme d’abonnements mensuels ou de kits dans lesquels on va aborder chaque mois, ou à chaque kit, une thématique : réchauffement climatique, eau, pollution, petites bêtes, océan, animaux menacés… Chaque mois, on va avoir des fiches ludiques et des vidéos pour comprendre comment ça fonctionne.
Et ensuite, on fera plein d’activités avec les enfants pour explorer, mais en s’amusant : des activités manuelles créatives, des jeux, des recettes, des constructions… Chaque mois, on va aussi trouver un grand jeu : une chasse au trésor (ça plait vachement aux enfants), un escape game, des enquêtes, des énigmes…
Là, c’est tout prêt. Les parents n’auront pas la contrainte de se dire « j’ai pas le temps, j’y connais rien, je ne sais pas quel mot utiliser… ». Tout est prêt !
Juliette : Il suffit de trouver le temps de le faire ! Et ça, c’est le plus facile !
Mélanie : Voilà ! Il faut se bloquer une heure par semaine, en se disant par exemple « le mercredi matin, on fait ça ». Et après, les enfants vont avoir pleins d’idées pour développer et faire des choses par eux-mêmes.
Le plus dur est de se dire « je prends le temps de parler de cette problématique avec mes enfants ».
Juliette : Oui, mais en même temps, ça les occupe. Et, on est content quand nos enfants sont occupés ! Pour avoir essayé, j’ai constaté que mon fils va dire de lui-même « ah, c’était comme dans la vidéo… » Et c’est un super geste qu’il a appris.
Mélanie : Et ce sont des bons réflexes ! Et ils ne s’en rendent pas compte car ils font ça sous forme de jeux et petit à petit, ils vont cheminer aussi, ils vont grandir…Le but est qu’ils aient les billes (même si on leur transmet de façon inconsciente) pour qu’ils soient armés pour affronter de vraies problématiques qui vont vraiment s’imposer à eux quand ils seront plus grands et qui vont être capitales dans l’avenir de la planète.
Juliette : Merci Mélanie d’être venue sur la boîte à outils des parents pour nous parler de ce sujet hyper important, qui me passionne et qui m’est, je dois l’avouer, un peu anxiogène.
Où est-ce qu’on peut te suivre ? Te retrouver ?
Mélanie :
- Sur mon blog Faire découvrir l’écologie aux enfants.fr
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- Sur mon podcast : Faire découvrir l’écologie aux enfants
Juliette : Merci Mélanie !