Episode 5 – La tyrannie des deux ans

La tyrannie des deux ans s’appelle aussi les terrible two ou la période du non, celle de l’affirmation de soi. Bref, vous l’aurez compris, quel que soit le nom que l’on donne à cette période, c’est une période difficile à vivre.

Qu’est-ce que la tyrannie des deux ans ? 

C’est une période pendant laquelle l’enfant s’oppose. Il s’oppose vivement et sur à peu près tout. En tout cas, sur des sujets aussi primordiaux que la couleur du body que vous voulez lui mettre. 

Elle arrive entre un et trois ans et dure plus ou moins longtemps selon les enfants. 

C’est ainsi que votre enfant tient absolument à mettre des sandales alors que, vu les trombes d’eau qui tombent dehors, vous lui proposiez plutôt les bottes…

C’est une phase qui est primordiale pour le développement de votre enfant. C’est comme l’acquisition de la permanence de l’objet. Vous savez quand votre enfant, bébé, autour des neuf mois, fait tomber un objet par terre et vous le ramassez. Là, il acquiert la permanence de l’objet c’est-à-dire que s’il ne voit pas l’objet ou la personne, cet objet ou cette personne continue d’exister. Une façon plus sympa de passer cette phase est de jouer au « caché coucou » : on cache son visage ou juste ses yeux avec ses mains ou une serviette ou n’importe quoi d’autre et on fait coucou. Rires garantis de l’enfant. Je referme la parenthèse. 

Cette phase, quand elle arrive, vous pouvez vous dire que votre enfant va bien. Ça vous aidera peut-être à traverser cette phase de façon un peu plus zen. 

C’est une phase primordiale car avant cette période d’opposition, l’enfant, le bébé ne sait pas qu’il est une personne différente de sa personne de référence (c’est, en général, la mère, très fréquemment aussi le père mais si l’enfant ne vit ni avec l’un, ni avec l’autre, c’est cette autre personne). Pour lui, avant cette phase d’opposition, il ne fait qu’un avec sa personne de référence. Tout ce que veut sa personne de référence, il le veut aussi. Il n’a pas de volonté propre. 

Or, avant cette période d’opposition ou en même temps, l’enfant acquiert beaucoup d’autonomie. Il se déplace, il arrive à faire de plus en plus de choses avec ses mains comme manger tout seul par exemple, il apprend la propreté, il s’habille tout seul, etc. Donc, il se dit qu’il peut décider un peu tout seul aussi. Enfin beaucoup. Donc, il s’oppose à ce que l’on veut nous, parents. Et là, tout le monde en prend, il n’y a pas que l’adulte référent à qui il s’oppose. En réalité, il s’oppose à tous  et en particulier à tous ceux qui le laissent s’opposer. 

Par l’opposition, il va « créer » sa propre personnalité. Il va s’affirmer. 

C’est donc primordial pour l’enfant. 

Le comportement que va avoir l’enfant est qu’il va dire souvent non. Il va peut-être commencer à faire des colères à défaut de ne pouvoir exprimer son opposition très forte autrement. Il va vouloir vous commander. Il va vouloir décider. 

Par exemple, vous lui mettez une assiette remplie de son plat préféré et il va vous dire « j’aime pas, je veux pas manger » ou autre refus… Vous allez vouloir lui mettre des bottes parce qu’il pleut et il va vouloir mettre des sandales. Vous allez vouloir lui mettre tel vêtement et il va vous dire non, en se tortillant sur la table à langer de façon à ce que vous ne puissiez pas l’habiller, voir à enlever ses habits une fois mis. 

Ma fille refusait même que je mette de la musique dans la voiture. 

Cette opposition est plus ou moins difficile. Chez certains enfants ça dure seulement quelques mois, un peu plus pour d’autres. Certains enfants vont faire des crises à répétition, pour d’autres ça va se passer plus en douceur… Il n’y a pas de règle, comme d’habitude avec les enfants me diriez-vous…

Comment fait-on pour passer cette période d’opposition avec le plus de sérénité possible ? 

Déjà, on se rappelle que c’est une étape essentielle du développement de son enfant et que c’est une preuve concrète que notre enfant va bien. Donc à chaque moment difficile, on se dit « mon enfant va bien » parce que c’est quand même très rassurant pour nous parent de savoir que notre enfant va bien. 

Ensuite, on s’oppose à l’opposition. Et ça, c’est crucial pour les années qui vont suivre. Si on cède trop facilement, trop souvent, on va habituer notre enfant à ce qu’il décide de tout. 

Si quand on l’habille et qu’il ne veut pas mettre les vêtements qu’on a choisis, on peut lui donner le choix entre deux tenues, par exemple. Dans ce cas, tout le monde est gagnant. L’enfant a choisi sa tenue et vous l’avez habillé. 

Quand il veut mettre ses sandales alors qu’il pleut, il faut lui expliquer que les sandales c’est non aujourd’hui parce qu’il pleut. Quand il pleut on met des bottes. Par contre, un autre jour, on pourra mettre les sandales. 

Quand il ne veut pas manger son plat préféré qu’on lui a préparé avec amour, on lui explique que ce qu’il y a à manger ce soir, c’est ça. S’il ne veut pas le manger, ok, on ne va pas le forcer à manger mais que dans ce cas, il ne mange rien d’autre. Donc pas de yaourts, de fruits, de gâteaux, de bonbons. Je fais une nouvelle parenthèse sur le fait que ça ne pose pas de problème si l’enfant ne mange pas car il n’a pas faim ou pas envie. Si on les force, on dérègle leur appétit, et on peut créer des troubles alimentaires. L’enfant a le droit de ne pas avoir faim et de sauter un repas, comme ça nous arrive à nous aussi. Fin de la parenthèse. 

Vous lui expliquez pourquoi vous lui imposez quelque chose. A chaque fois. Quand il n’y a pas de situation d’urgence bien sûr, sinon vous lui expliquez après. L’enfant est capable de comprendre que quand il pleut, s’il met ses sandales, il va avoir les pieds mouillés et froids. 

Il faut rester constant dans les instructions. Il ne faut pas un jour dans tel cas c’est non et un autre jour, parce que vous êtes fatigués, vous êtes pressés, vous êtes malade, vous avez juste envie de le déposer à la crèche ou chez la nounou, c’est oui. Ça c’est à proscrire complètement. Il n’y a rien de mieux pour créer une insécurité chez l’enfant et le perdre dans vos raisonnements. 

Une autre chose à proscrire, est la différence d’avis entre plusieurs adultes. On va prendre l’exemple de deux parents, pour l’explication. L’un dit non, l’autre dit oui. Ça, même chose que l’inconstance de nos décisions, ça perd l’enfant et crée un sentiment d’insécurité. Les règles ne sont pas les mêmes selon que c’est une personne différente qui les applique… Non, si l’un a dit non, même si l’autre dirait oui, ça reste non. Ensuite, on peut discuter entre les deux parents pour s’aligner avant la prochaine demande du même genre. 

Il y a aussi le cas où on a dit non mais devant l’insistance de l’enfant, on se rend compte que sa demande est vraiment importante pour lui et que finalement, on aurait dû dire oui. Alors là, c’est pas génial parce qu’on se contredit soi-même en l’espace de quelques minutes suite à l’insistance de l’enfant. D’un côté, si on cède, on va montrer à l’enfant que c’est en insistant qu’il arrive à obtenir ce qu’il veut. L’insistance est graduelle d’ailleurs. Ça peut finir en vraie crise et on lui dit « ok, mange un yaourt ». Mais de l’autre, on se dit que finalement, l’enfant peut bien manger un yaourt après tout… Ce n’est qu’un yaourt. Si ça lui fait tant plaisir, qu’il le mange son yaourt… 

Donc, dans ce cas-là, on peut céder mais on lui explique pourquoi. On lui dit « tu sais, finalement, je me dis que ce n’est pas une si mauvaise idée. Tu pourrais faire ça parce que je trouve que patati patata ». 

Mais ça, c’est un vrai problème. Il faut choisir ses batailles et s’y tenir. Donc, c’est une période pendant laquelle on va relâcher notre niveau d’exigence. 

Et, dès que c’est possible, vous lui laissez le choix, vous le laissez décider. Par exemple, quand vous jouez avec votre enfant et qu’il vous commande, en vous disant de prendre la petite voiture verte, oui celle-là et pas celle d’à côté, vous pouvez vous exécuter en lui rappelant que là, c’est un jeu donc oui, c’est l’enfant qui décide. Et inversement, quand vous lui imposez quelque chose, vous lui dites, là, c’est moi qui décide. Il y a des situations dans lesquelles tu décides et d’autres dans lesquelles c’est moi qui décide. Là, c’est moi qui décide. 

Si on cède à toutes ses demandes, si on ne s’oppose pas à l’opposition, on risque d’avoir un enfant qui a l’habitude de décider de tout. Et ça, c’est très délétère parce qu’à deux ans, l’enfant a des demandes qui sont relativement raisonnables mais quand il grandit, ses demandes vont être de plus en plus déjantées et donc difficiles à contenter. 

En s’opposant à l’enfant qui s’oppose, on va au contraire lui apprendre à respecter les autres et vous en premier, qu’il y a des règles en société et c’est le meilleur tremplin dans la vie. Ne serait-ce qu’à l’école : respecter ses camarades, les adultes qui l’encadrent, etc. 

Je vous invite également à écouter ou réécouter l’épisode 3 sur la crise

Donc pour récapituler :

  • cette phase est cruciale pour les enfants, ce qui est très bon signe. On se le rappelle à chaque fois que c’est compliqué. 
  • on ne lâche rien, on reste ferme et calme.
  • on lui explique nos décisions.
  • on reste constant dans nos décisions que ce soit avec nous-mêmes dans un court laps de temps, ou un autre jour ou que ce soit avec quelqu’un d’autre. 
  • User de ruses dès que l’on peut,  en lui laissant le choix quand c’est possible. 
  • lui expliquer que, dans certaines situations, c’est le parent qui décide et dans d’autres, c’est l’enfant qui décide.
  • on lui donne de l’amour, de l’amour et encore de l’amour. 
coach parental