Episode 19 – Comment en finir avec la punition ?

C’est un sujet éminemment controversé : la punition. 

Et c’est un sujet pour lequel les coachés viennent me voir !

Par exemple, notre enfant fait une bêtise comme renverser quelque chose, désobéir à une demande, avoir une mauvaise note, mal parler ou taper ses parents ou ses frères et soeurs, ou n’importe qui d’autre d’ailleurs, dessine sur les murs, etc. 

Et vous le punissez en le privant de quelque chose comme d’un jouet ou d’un écran, quel qu’il soit, ou d’une sortie, vous le grondez en employant des mots durs, vous pouvez lui donner une fessée aussi – elle est interdite depuis 2019 mais qui sait ce qu’on fait chez soi ? – vous pouvez lui demander de s’isoler au coin ou dans sa chambre, vous pouvez lui demander de demander pardon, de copier des lignes, etc. 

Si vous faites ça, parce que suis sûre que beaucoup d’entre vous le font, si vous le faites, est-ce que vous trouvez que ça fonctionne ? Que l’enfant a bien compris sa bêtise, accepte la remontrance et la punition et surtout ne le refera plus jamais ? 

Et si vous répondez oui, est-ce que vous trouvez votre enfant heureux, épanoui, ayant confiance en lui, en les autres, en vous ? 

Imaginez un instant que ce soit vous l’enfant qui a fait une bêtise. Vous avez renversé votre verre d’eau par terre, sans faire exprès, vous vous trouvez tout.e honteux.se, vous n’avez pas fait attention. Maintenant, il va falloir nettoyer, vous n’avez plus rien à boire et en plus de ça, votre éducateur, la personne qui compte le plus pour vous ou une des personnes qui compte le plus pour vous, vous dit quelque chose comme « non mais c’est n’importe quoi, tu pourrais faire attention quand même ! Il va falloir tout nettoyer, je venais de faire le ménage, c’était tout propre. Tu ne respectes vraiment pas le travail que je fais ! Tu me nettoies ça tout de suite et tu files dans ta chambre ! » 

Comment vous vous sentez ? 

Je parie que vous vous sentez rabaissé, dénigré, incompris, nul, vous avez perdu toute confiance en vous. Après tout, si cette personne qui compte tellement pour vous, vous dit tout ça, c’est que ça doit être vrai. Donc, vous allez tout seul avec votre chagrin dans votre chambre et tout ça tourne en boucle dans votre tête. 

Je prends en particulier cet exemple car je trouve que c’est typiquement un moment où on devrait juste dire « c’est pas grave, on passe un coup d’éponge, on re-remplit le verre et hop c’est oublié ». 

Et je prends cet exemple car je sais que certaines personnes réagissent plutôt comme la première personne que j’ai décrite. 

Une dernière question : est-ce que la réaction virulente que j’ai décrite vous empêcherait de recommencer, c’est-à-dire que grâce à cette réaction, plus aucun verre ne sera jamais renversé ? 

Je ne crois pas. 

Je pense qu’il faut absolument garder à l’esprit que mal agir peut arriver à tout le monde et peut toujours être réparé. 

Vous renversez des choses, vous cassez des choses et même si vous ne pouvez pas les réparer, ce n’est pas la fin du monde.

La punition infligée est souvent prise comme injuste et disproportionnée par les enfants.

Elle éteint le comportement sous la contrainte mais ne le remplace pas, elle crée du stress et une dépendance et favorise les stimuli négatifs. 

On entend souvent l’expression de discipline positive « les 4R de la punition » : rancoeur, revanche, rébellion, retrait.

Je vous renvoie à mon épisode sur l’éducation positive dans lequel je décris que l’éducation positive part du postulat que les enfants doivent être considérés de la même façon que des adultes et que donc, on doit s’adresser à eux comme on s’adresserait à des adultes. Et l’éducation positive, c’est aussi le bannissement de tout châtiment, de toute violences éducatives ordinaires (VEO) dont les punitions font partie. 

Qu’est-ce qu’une punition ?

Alors déjà, j’aimerais que tout le monde sache exactement de quoi on parle. 

Certains font une distinction entre punition et sanction. 

La punition serait lors des violences physiques ou verbales. Alors violence physique, tout le monde se représente à peu près ce que c’est : une fessée, une claque… Je ne vais pas citer des choses pires mais, il peut y en avoir. Les violences verbales sont des phrases comme « tu fais toujours mal, t’es qu’un bon à rien, tu ne réussiras jamais à rien, si tu ne fais pas ça, pas la peine de venir me demander quoi que soit (y compris des signes d’affection, de tendresse)… ». Ce sont des piques qui entament la confiance en soi des enfants, qui les font se sentir inférieurs, diminués ou qui conditionnent l’amour qu’on leur porte, alors que l’amour de parent à enfant devrait être inconditionnel. 

Les violences physiques et verbales sont une humiliation pour l’enfant et détruisent la confiance qu’il a en lui, en nous, en les autres, en la vie. 

C’est un dressage, une dévalorisation constante. L’enfant a peur. 

Je vous dresse un tableau volontairement choquant et noir mais complètement véridique pour que vous preniez conscience des conséquences des actes et des paroles que vous avez de façon consciente ou inconsciente. 

Je n’ai pas pour but de vous faire culpabiliser, bien évidemment, mais de faire changer votre comportement vis-à-vis de vos enfants si c’est celui-ci que vous avez. 

Et la sanction serait une privation, une isolation… La sanction est plus mesurée que la punition et je vous expliquerai pourquoi un peu plus tard. 

Alors, j’ai cherché d’où cette distinction entre ces deux mots venait. Et je n’ai pas trouvé grand chose. 

Le Larousse définit la punition comme l’action de punir. Donc, j’ai cherché « punir » et c’est « frapper quelqu’un d’une peine, sanctionner un acte : punir un criminel. La loi punit le vol d’emprisonnement.

Ou, infliger à quelqu’un une punition pour telle action, telle attitude : punir un enfant de sa gourmandise.

Ou, constituer un châtiment, une sanction »

Et la peine est définie comme une « sanction appliquée à titre de punition ou de réparation pour une action jugée répréhensible. »

La définition de punir renvoie à une sanction. 

Et la sanction est définie par le Larousse comme un « acte par lequel un usage, un événement, une action sont entérinés, reçoivent une sorte de validité : un mot qui a reçu la sanction de l’usage.

Ou, conséquence naturelle d’un acte : l’échec est la sanction de la paresse.

Ou, mesure répressive infligée par une autorité pour l’inexécution d’un ordre, l’inobservation d’un règlement, d’une loi : prendre des sanctions contre des grévistes.

Ou, conséquence juridique du non-respect d’une règle de droit. » 

Le Robert a une définition bien différente donc je vous la lis. C’est assez intéressant. C’est un « acte par lequel le chef du pouvoir exécutif approuve une mesure législative.

Ou, une approbation, confirmation, ratification. Mot qui a reçu la sanction de l’usage. 

Ou, peine établie par une autorité pour réprimer un acte. »

On parle de peine seulement à la troisième définition. 

La conclusion de tout cela est qu’il n’y a pas de réelle différence entre les mots sanction et punition. Quand on dit qu’on punit son enfant, on ne veut pas forcément dire qu’on emploie des violences physiques ou verbales à son encontre. 

Alors on l’a vu, la punition ou sanction, comme vous préférez, entraîne une diminution de la confiance en soi des enfants, et en nous, une dévalorisation, une incompréhension, une injustice. Elle n’empêche pas la récidive, elle ne permet pas d’apprendre une leçon. 

Donc en plus d’être inefficace, elle entraîne des conséquences dommageables pour votre enfant et la relation que vous avez avec lui. 

Par quoi remplacer la punition ?

Je vous entends me dire ok mais qu’est-ce qu’on fait quand nos enfants désobéissent ? Si on ne peut pas les mettre au coin, leur donner de petites tapes ou leur mettre une fessée…

On fait quelque chose quand même parce qu’il faut absolument reprendre le comportement inacceptable.

Il y a plusieurs méthodes alternatives que je vais vous décrire mais l’idée de base est d’expliquer la règle à respecter. Ça parait évident comme ça mais ça ne l’est pas forcément en pratique. 

Rappelez la règle

Il faut que la règle soit claire, énoncée, fixe (il ne faut pas que lundi l’enfant ait le droit à du sirop de grenadine pour le repas et que mardi non) et expliquée. Donc déjà, commencez par rappeler la règle ou l’instaurer. L’enfant est comme tous les êtres humains, il ne lit pas vos pensées. Donc si vous avez une règle dans votre tête, que vous râlez toujours car elle n’est pas respectée mais que vous ne l’avez pas énoncée clairement, ça ne peut pas fonctionner. 

Donc, rappelez la règle et expliquez-la. Expliquez pourquoi vous mettez cette règle : parce que c’est dangereux, parce qu’il faut que la maison soit rangée, parce que ça va te permettre d’être en bonne santé… 

Et avec la règle la sanction en cas de non-respect. 

Il faut bien manger pour être grand, fort, en pleine santé. Et maman/papa a très envie que tu sois en bonne santé. Si tu n’as pas faim, tu as le droit de ne pas finir ton assiette mais si tu ne finis pas ton assiette, tu n’auras pas de dessert. Règle énoncée et expliquée avec conséquence associée.

Si vous ne faites pas ça, l’enfant va être sanctionné ou puni par l’adulte sans comprendre pourquoi. Ça va créer un sentiment d’insécurité pour lui qui est très inconfortable et qui va avoir d’autres conséquences néfastes. Je vous renvoie à ce sujet à l’épisode 8 sur le cadre qui vous explique comment fixer un cadre de façon efficace.

Valorisez vos enfants

Je vous conseille aussi de valoriser à fond tous les comportements positifs. En fait, lorsqu’un enfant fait quelque chose qu’il ne devrait pas faire, on va le lui dire mais quand il fait quelque chose qu’il est censé faire ? Il faut aussi dire quelque chose ! Et je dirais même qu’il faut en faire plus pour un comportement attendu. Il faut renforcer la valorisation de l’enfant lorsqu’il fait quelque chose de bien. Ça l’encouragera à recommencer.

Une sanction efficace

Si vous voulez sanctionner, veillez à ce que la sanction remplisse les cinq critères que je vais vous décrire. C’est une sorte de punition « autorisée » si vous préférez. 

1) Il faut sanctionner immédiatement, mais à froid. Je m’explique : si votre enfant a fait une bêtise, que quelques heures ou jours passent, qu’il a oublié la bêtise qu’il a faite, qu’il est tranquillement en train de dessiner, par exemple, et que là vous lui dites « pour ce que tu as fait à tel moment, tu auras telle punition ». Alors là, vous êtes sûr.e qu’il ne va rien y comprendre. Il était tranquillement en train de dessiner et vous arrivez avec votre punition. Echec assuré. 

Il n’en va pas de même si vous lui avez dit, quand il a fait sa bêtise, que vous alliez réfléchir à la sanction qu’il aurait. Mais choisissez un moment opportun pour lui dire. Pas quand il est au calme, tranquille. Sinon c’est la crise assurée. 

Si vous sanctionnez votre enfant sur le coup de l’émotion, la sanction risque d’être trop forte et ne remplira pas les critères suivants. C’est pour ça que je dis « à froid ».

2) Il faut que la sanction permette de rappeler la règle : puisque tu as écrit sur le mur… On explique pourquoi il ne faut pas écrire sur le mur. Pour les petits, on fait une explication courte et facile à comprendre. Il ne faut pas écrire sur le mur parce que ce n’est pas joli. Le mur reste blanc et tu dessines sur une feuille.

3) Il faut que la sanction soit en rapport avec la faute : s’il se chamaille avec son grand frère parce qu’il lui a piqué un jouet et que vous le privez de télé, ça n’a rien à voir. Il va considérer que c’est injuste et il ne va pas comprendre. 

4) Il faut que la sanction soit proportionnelle à la faute : vous n’allez pas le priver pendant un mois de télé parce qu’il a eu une mauvaise note à l’école. C’est très important surtout chez les petits qui n’ont pas du tout la même notion de temps que nous. 

5) Et dans la mesure du possible, la sanction devrait être réparatrice. Si l’enfant a dessiné sur les murs, c’est lui qui doit nettoyer. S’il a cassé quelque chose, il doit réparer ou donner autre chose en échange. 

Par contre, je ne suis pas pour obliger l’enfant à dire pardon. Pour moi, le pardon devrait être sincère et spontané. Alors, je passe pour une mère indigne lorsque mes enfants font une bêtise sans les obliger de demander pardon mais j’assume. Je ne suis plus à ça près… Et je pense que ce n’est pas parce qu’on ne dit pas le mot pardon qu’on ne le pense pas, qu’on ne va pas faire des choses, qu’on ne va pas avoir des attitudes qui vont crier notre pardon. 

Quelles alternatives à la punition ? 

Et si vraiment, vous voulez trouver des alternatives à la sanction/punition, en voici quelques unes. 

L’idée de ces méthodes, et c’est la raison pour laquelle je les apprécie tellement, est de prévenir les bêtises. 

1) Prévenir l’enfant qu’une transition va avoir lieu. « Tu viens manger dans cinq minutes, prépare-toi à arrêter de jouer ». L’enfant peut donc finir ce qu’il est en train de faire ou vous demander un peu plus de temps si ce n’est pas suffisant… Il est prévenu de ce qui va arriver. Et ça, ça marche vraiment. Ça évite que l’enfant désobéisse. 

2) La méthode du 1, 2, 3. Je compte jusqu’à trois et à trois tu dois être à table. Parfois ça fonctionne mais ça ne marche pas toujours. Mon fils me demande parfois de compter jusqu’à 1000. Bon. Echec. 

3) La méthode de la course ou du concours. Le premier qui arrive à table a gagné. Là aussi, attention car quand il y a un vraiment plus petit, qui donc perd à tous les coups ou presque, et que ça l’embête, ça peut avoir un effet délétère. Mais vous pouvez à ce moment-là renforcer la coopération entre membres d’une fratrie en disant « vous aurez gagné quand vous serez tous à table ». Là, les grands vont aider les petits et en plus c’est toujours une satisfaction énorme de voir que nos enfants s’entraident. 

4) Si deux enfants se chamaillent, par exemple un frère et une soeur, sur une activité, vous pouvez les séparer. L’un va faire une activité calme dans cette pièce et l’autre dans une autre pièce. Eviter les chambres respectives pour ne pas que vos enfants se sentent isolés. Et vous leur dites que quand ils seront de nouveau prêts à jouer ensemble, ils pourront le faire. 

5) Faire un temps de pause pour l’aider à retrouver son calme. Votre présence est souvent nécessaire. Alors, dans la vie merveilleuse des bisounours, ce serait dire à l’enfant viens, on va sur le canapé se calmer tous les deux. Et l’enfant accepte sans problème de se calmer. Dans ma vie à moi, je tiens mon enfant sur le canapé pendant qu’il se débat car il veut encore aller faire sa bêtise. Et ça prend du temps. Et il faut que je tienne fort car il se débat. Et pendant ce temps, je lui parle calmement, je chante, je fais des bisous, des guillis… Et au bout d’un moment, la colère retombe. Vous me direz si ça se passe mieux chez vous. 

6) Vous pouvez chuchoter. Quand l’enfant est énervé, excité, agacé, vous lui chuchotez à l’oreille. Déjà, il va adorer parce que vous lui dites un secret. Ensuite, il va devoir se concentrer sur votre chuchotement. Effet calmant assuré. 

7) Et enfin, je vous encourage à reparler de la situation à froid. Cela permet de mieux comprendre le comportement de l’enfant, qu’il prenne conscience de ce qu’il a fait, qu’il réfléchisse à une réparation. Et surtout, ça prévient la récidive. 

Pour résumer cet épisode : 

Les violences corporelles ou verbales sont à bannir dès maintenant. 

Si vous voulez sanctionner votre enfant, il faut absolument qu’il connaisse la règle et les conséquences de sa violation. Valorisez les comportements positifs de vos enfants.

Il faut que la sanction soit immédiate et à froid, qu’elle soit l’occasion de rappeler la règle, qu’elle soit en rapport avec la faute, proportionnelle à la faute et réparatrice. 

Si vous souhaitez tester des méthodes alternatives à la sanction, vous pouvez accompagner votre enfant dans les transitions, le 1, 2, 3, la course, la séparation des enfants qui se disputent, le temps de pause, le chuchotement et reparler de la situation à froid. 

Et enfin, je voulais vous rappeler que punir son enfant, le gronder, n’est pas mal en soit. C’est dans un monde qui n’existe pas que, nous, parents, n’aurions pas besoin de faire ça. Ne culpabilisez pas parce que vous avez puni ou grondé votre enfant. Il a besoin d’un cadre car c’est sécurisant pour lui, c’est fondamental. Et si vous culpabilisez quand même du comportement que vous avez eu, rappelez-vous que vous avez le droit à l’erreur. Tout comme votre enfant qui a le droit de faire des bêtises. 

Je vous invite à me dire dans les commentaires ou par mail si vous arrivez à changer votre pratique et ce qui fonctionne pour vous et vos enfants. 


Cet épisode de podcast s’inscrit dans le parcours d’écoute consacré aux étapes de vie tout comme :


Si vous ne savez pas comment faire pour bannir la punition, parlons-en lors d’un rendez-vous découverte gratuit !

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