On l’appelle éducation positive, mais aussi éducation bienveillante ou discipline positive.
Quand je suis devenue mère, et que j’ai eu connaissance de ces courants d’éducation, j’ai d’abord tiqué sur les mots. Ça voudrait dire qu’il y aurait une éducation négative et malveillante ? Parce que l’éducation positive étant plutôt récente, ça voudrait dire que j’ai été élevée avec cette éducation négative et malveillante. Or, non, je ne trouve pas que moi-même j’ai été élevée avec négativité et malveillance.
Ensuite, j’ai cru tout ce qu’on disait de mal sur ce nouveau courant éducatif. C’est-à-dire qu’il ne faut jamais gronder l’enfant, jamais le punir, jamais se mettre en colère, lui dire oui à tout. Et quand je voyais des enfants insupportables dans la rue, je me disais « lui, il est élevé avec cette bêtise d’éducation positive et voilà il est insupportable. C’est de la faute des parents ».
Puis, j’ai eu moi-même des enfants et j’ai bien compris que, confronté à la réalité de la parentalité, ma vision des choses n’était pas du tout la même. Et j’ai arrêté mes jugements inappropriés.
En m’intéressant à l’éducation, je me suis naturellement intéressée à l’éducation positive qui est un courant éducatif important ces dernières années. Il prend une large part.
Qu’est-ce que l’éducation traditionnelle, classique ?
Je pense que vous qui m’écoutez, tout comme moi d’ailleurs, nous avons été élevé.e.s avec cette éducation traditionnelle qui s’assouplissait déjà. L’éducation traditionnelle est celle dans laquelle l’enfant doit rester à sa place, c’est-à-dire en étant inférieur aux adultes. Ils doivent obéir quand on leur demande quelque chose, ils ne doivent pas faire de bêtises, sinon, ils sont punis, frappés, rabaissés. Je pense que l’éducation nationale est encore fondée sur ce principe. Les enfants doivent apprendre leurs leçons et les restituer sinon ils ont une mauvaise note. Dans le temps, les enseignants pouvaient frapper les enfants ou les mettre au coin avec un bonnet d’âne.
L’enfant n’était pas considéré comme une personne à part entière, ayant les mêmes droits que les adultes. Et je pense que c’était en lien avec la façon dont l’ensemble de la société fonctionnait. Dans les entreprises, les sous-hommes étaient les femmes et les personnes les plus respectables étaient les hommes les plus âgés. C’est encore parfois vrai. Et encore, je ne parle pas de couleur de peau… Un seul constat : les mentalités ont du mal à évoluer rapidement…
La société a bien évolué. Les femmes sont généralement considérées comme des êtres égaux aux hommes. Je ne dis pas que ça y est, c’est acquis. Loin de là ! Mais on ne peut pas nier qu’il y a eu des progrès phénoménaux. Les femmes peuvent avoir un compte en banque, peuvent voter, peuvent divorcer, prétendre au même salaire que les hommes…
Et on s’intéresse maintenant à la question des enfants. L’idée principale, d’après moi, est que l’on considère plus les enfants qu’avant. On s’intéresse à eux, on essaye de les comprendre. Et surtout on a intégré le fait que les blessures, les traumatismes psychologiques subis pendant l’enfance ont une répercussion sur l’adulte que cet enfant va devenir.
Mais la société est en constante évolution. Par exemple, Françoise Dolto disait qu’une petite tape sur la main quand l’enfant fait une bêtise était possible.
Je ne pense pas qu’elle dirait ça aujourd’hui. Après tout, je n’en sais rien. Je ne vais pas m’approprier l’immense travail de Françoise Dolto ni le travestir en imaginant ce qu’elle dirait si elle était encore là aujourd’hui. Mais des personnes qui ont repris son flambeau ne le disent plus.
Alors qu’est-ce que l’éducation positive exactement ?
Est-ce que l’éducation positive c’est ne jamais contrarier notre enfant, lui dire oui à tout, lui donner tous les droits, ne jamais crier après lui, ne pas lui mettre de cadre, se laisser marcher sur les pieds, ne pas se faire respecter de lui et créer un enfant roi ?
Vous noterez que cette description est assez effrayante et ne ferait envie à personne.
Je précise également qu’en faisant des recherches pour préparer cet épisode, j’ai remarqué que chacun avait défini l’éducation positive à sa sauce. Il n’y a rien de fixe, il y a des idées communes mais diverses façons de les mettre en place. Ce qui n’est pas mal en soi mais ça nécessite de piocher, de choisir ce qu’on applique ou pas.
J’ai cherché qui était la personne qui avait créé l’éducation positive, qui en était à l’origine. Et j’ai trouvé qu’il n’y avait pas qu’une personne mais plusieurs. J’avais déjà entendu le nom de Alfred Adler, Alice Miller, de Maria Montessori et en France de Catherine Gueguen et Isabelle Filliozat. Il y en a d’autres comme Haim Ginott et Olivier Maurel, chacun.e a apporté sa pierre à l’édifice. L’édifice est de considérer que l’enfant n’est pas un sous-adulte mais un être humain à part entière que l’adulte ne doit pas dominer.
La communication non violente créée par Marshall Rosenberg en est l’un des piliers.
Donc l’idée principale de l’éducation positive, je garde uniquement ce terme pour que mon exposé soit plus simple mais il regroupe tous les autres, est que l’enfant n’est pas un sous-adulte, un être humain inférieur à nous parents mais un être humain à part entière qui a des sentiments, qui ressent des émotions, qui a des envies, des rêves et des désirs, qui a des capacités, des choses qu’il ne sait pas faire ou pas encore faire ou qu’il ne sait pas encore bien faire mais en tout cas, il est bien une personne à part entière. Il serait donc l’équivalent d’un adulte, en terme de valeur que l’on donne aux autres, mais un adulte qui n’a pas encore assez expérimenté la vie et qui n’y connait pas grand chose. Donc un adulte avec des capacités moindres, on pourrait dire. Mais sûrement pas avec une valeur moindre.
Et du coup, est-ce que quand un adulte fait une bêtise comme renverser son verre d’eau sur la nappe, on va lui crier dessus, le rabaisser en lui disant que quand même il pourrait faire attention, et qu’est-ce qu’il est maladroit, et file dans ta chambre, je ne veux plus te voir ? Non, on ne ferait pas ça. On dirait « oh mince, attends, je vais t’aider à nettoyer et puis je vais te re-remplir ton verre ».
Donc, l’éducation positive, ce serait d’avoir cette réaction avec les enfants. Ne pas le pourrir parce qu’il fait une bêtise.
L’éducation positive, c’est supprimer toutes les violences éducatives ordinaires (VEO) comme des fessées ou des gifles, mais aussi des humiliations, des phrases assassines qui rabaissent les enfants et les punitions. Je consacrerai un épisode entier aux punitions tellement le sujet est vaste et important.
L’éducation positive, c’est aussi accueillir les émotions des enfants plutôt que de leur dire de se débrouiller avec ou de leur dire de mettre un couvercle dessus.
L’éducation positive, c’est faire preuve d’autorité, de fermeté et de structure mais pas d’autoritarisme. L’autoritarisme c’est imposer, ordonner… L’enfant doit avoir un cadre, une structure pour s’épanouir. Et l’enfant ne doit pas être autorisé à bafouer ce cadre. Sinon, c’est insécurisant pour lui. Je vous renvoie à l’épisode 8 dans lequel je parle du cadre.
L’éducation positive, c’est de la bienveillance, de l’amour et de la chaleur mais ce n’est pas du laxisme. L’enfant doit être sûr de l’amour inconditionnel de ses parents. Il doit recevoir des signes d’affection physique et verbale. Vous devez faire preuve d’empathie envers lui, accueillir ses émotions. Je vous renvoie à l’épisode 4 du podcast à ce sujet.
L’éducation positive, c’est responsabiliser son enfant. Lui donner des responsabilités en fonction de son âge, de la toute petite enfance à l’adolescence. Si l’enfant réalise ses tâches, ça le met en confiance. Et s’il ne le fait pas, vous êtes là pour l’encourager, l’aider, le soutenir.
Car l’éducation positive, c’est aussi encourager et valoriser son enfant.
L’éducation positive serait validée par les neurosciences. J’ai vu ça dans nombre d’articles rédigés par des professionnel.le.s de santé et des coachs parentaux mais je n’ai jamais trouvé en quoi elle était validée par les neurosciences. Ça ne veut pas dire que ce n’est pas vrai, loin de là mais je ne peux pas tellement vous en dire plus. Par contre, on se doute bien que quand un enfant se fait frapper, rabaisser, humilier, il y a des séquelles sur son cerveau. On se doute bien qu’un enfant qui subit ces violences ne sera pas le plus épanoui des adultes.
Bref, l’éducation positive, c’est beaucoup de choses mais, ce n’est pas : ne pas donner de cadre à ses enfants, ne pas les frustrer, ne pas leur interdire quelque chose, dire oui à tout, etc.
Le revers de l’éducation positive
L’un des principaux défauts de l’éducation positive est qu’elle peut être perçue comme une charge de plus pour les parents. Il faudrait ne jamais crier, avoir des enfants qui ont compris les règles et qui les appliquent dès qu’on leur demande voire même sans qu’on leur demande. Il faudrait avoir toujours le temps de faire les choses bien.
Avec l’épée de Damoclès au-dessus de notre tête d’être négatif.ve ou malveillant.e si nous nous écartons des préceptes de l’éducation positive.
Et ça peut être une charge lourde à porter. Une de plus.
Mais rappelez-vous que vous n’êtes pas des parents parfaits. Je vous renvoie à l’épisode 6 dans lequel je traite de l’utopie du parfait parent. Vous pouvez péter un câble et crier sur vos enfants, vous pouvez les forcer à faire quelque chose parce que c’est maintenant que cette chose doit être faite et que vous n’avez pas le temps. Ça ne fait pas de vous des parents malveillants ou négatifs.
Alors, on l’adopte ou pas, cette éducation positive ?
Si je fais le point sur moi, et je vous invite à le faire sur vous, voici ce que j’en pense.
Je ne suis pas une aficionado de cette éducation positive. Avant de m’intéresser vraiment au sujet, c’était parce que je trouvais que c’était une mode, et je suis assez réfractaire à tout ce qui est effet de mode.
C’était aussi parce que je croyais qu’éducation positive rimait avec enfant roi. Je sais maintenant que ce n’est pas le cas.
Mais je reste étrangère à cette éducation positive tout simplement car je n’aime pas me donner d’étiquette, je trouve que ce serait m’enfermer dans un carcan qui ne me convient pas totalement. Je vous renvoie à l’épisode 7 du podcast dans lequel je traite des étiquettes. Je préfère suivre ma propre voie. Je ne me considère pas malveillante pour autant, bien au contraire. Vous avez d’ailleurs pu remarquer au fil des épisodes de la boîte à outils des parents que tout ce que je dis, tous les outils que je propose sont fondés sur les mêmes principes d’écoute, de bienveillance, de respect. J’ai d’ailleurs fait pas mal de renvois à des épisodes déjà publiés ou que j’ai prévu de faire. Mais, je sais aussi trop bien que les principes c’est bien joli, mais la réalité est parfois bien différente. Et, je ne veux pas non plus me mettre la pression à ne jamais crier, à faire tout toujours bien, car je sais que ce n’est pas possible, tout simplement.
Donc disons que j’ai adopté l’éducation positive oui, de base, sans savoir que ces principes avaient été théorisés, mais sans me coller cette étiquette et pas à tout prix.
Chacun.e fait comme il/elle peut face à la situation qu’il/elle rencontre. Donnons-nous le droit à l’erreur. Soyons bienveillant.e partout, tout le temps, avec tout le monde, incluant ses enfants mais aussi soi-même.
Je vous laisse réfléchir à ça !