Episode 22 – Les neurones miroirs

On baille quand on voit quelqu’un bailler. 

Le rire est contagieux.

On a de la peine quand on voit quelqu’un pleurer. 

On a le souffle coupé quand on voit le héros de notre film, ou de notre livre d’ailleurs, courir pour sauver sa vie ou le monde. 

On entend souvent « tel père tel fils ». Nos enfants ont nos expressions faciales. Même si ce sont des enfants adoptés. Ils ont des traits de caractère en commun avec nous. 

Les enfants jouent à nous imiter, puis répètent ce qu’on dit que ce soit des expressions ou des gros mots. 

Il y a des façons de communiquer « familiales ». Le père ne parle presque pas, le fils non plus. Dans cette famille, on est assez agressif alors que dans une autre il n’y a jamais un mot plus haut que l’autre. Et on reproduit ça avec nos enfants, avec nos proches. 

Tout ce que je vous dis parait logique car l’être humain est un être social et s’intégrer au groupe était vital pour l’homme des cavernes que nous étions. Quand on essaye de s’intégrer à un groupe, par exemple une nouvelle équipe professionnelle, nous sommes le dernier arrivé, et nous essayons naturellement de voir comment ce groupe fonctionne. Et dans un premier temps, on est tenté de respecter les « règles » et petit à petit seulement on va apporter notre propre touche. Car si on ne fait pas ça, je fais un raccourci, nous sommes exclus de la caverne et nous mourrons de froid. Pour reprendre l’exemple professionnel, si on est marginalisé de l’équipe, les promotions, les dossiers intéressants, les augmentations, ce ne sera pas pour nous non plus. 

Cette capacité à sociabiliser est due à beaucoup de choses mais depuis 1996, on sait que c’est en partie dû aux neurones miroirs. Aujourd’hui, on ne sait pas quelle est la part des neurones miroirs dans les comportements que je viens de décrire mais on pense, quand je dis « on » je parle de l’état de la science, qu’ils jouent un rôle très très important. 

Qu’est-ce que c’est les neurones miroirs ? 

Les neurones miroirs ont été découverts en 1996 par un groupe de chercheurs italiens menés par le neurologue Giacomo Rizzolatti qui travaillent à l’université de Parme. Ils ont découvert que, dans le cerveau des primates, c’étaient des chimpanzés, un certain nombre de neurones s’activaient quand le primate faisait une action mais aussi quand il regardait un autre primate faire la même action. C’était donc les mêmes neurones qui s’activaient. C’est-à-dire que faire ou voir faire active la même zone de notre cerveau. 

M. Rizzolatti a conclu que : « Nous sommes des êtres sociaux. Notre survie dépend de notre compréhension des actions, des intentions et des émotions des autres. Les neurones miroirs nous permettent de comprendre lesprit des autres, non seulement par le raisonnement conceptuel mais aussi par limitation. »

Donc non seulement, on comprend ce que l’autre fait. Par exemple, si je vois quelqu’un remplir un verre d’eau (cette personne a une bouteille d’eau dans la main et verse l’eau dans un verre), je comprends que cette personne remplit d’eau le verre de telle sorte qu’à la fin, il y a de l’eau dans le verre, que cette personne peut boire. 

Mais en plus, c’est comme si je le faisais !

Imaginons cet exemple transposé à un enfant qui voit cette scène pour la première fois. C’est un bébé, ou un très jeune enfant, et quand il voit une personne remplir un verre d’eau, il comprend que le verre contient désormais de l’eau mais en plus c’est comme s’il l’avait fait lui-même. Alors bien sûr, il n’a pas la force ni la dextérité de le faire mais dès qu’il l’aura, il saura le faire. Et c’est comme ça que, quand il joue à la dinette, le très jeune enfant va faire semblant de remplir un verre d’eau. 

On comprend donc que ces neurones miroirs jouent un rôle capital dans notre socialisation

Comme je viens de le dire, ce sont eux qui permettent l’imitation. Mais les neurones miroirs permettent aussi de communiquer efficacement, lorsqu’on se met à la place de l’autre, dans le référentiel de l’autre pour que notre message passe mieux. 

Ces neurones font que nous sommes empathiques, on ressent les émotions des autres comme si c’étaient les nôtres, ce qui n’est d’ailleurs pas forcément un cadeau…

Ils permettent la compréhension des intentions des autres, la collaboration entre individus, l’enseignement, la compétition.

Bref, plutôt des choses favorables et positives dans la vie. 

Vous voyez bien que sans ces neurones miroirs, la socialisation serait bien compliquée… On s’en ficherait des autres, on n’essaierait rien que les autres font déjà, quand on verrait quelqu’un en souffrance, on n’en aurait rien à faire… Bref, l’humanité irait encore bien plus mal qu’aujourd’hui !

On pense que c’est ce qui est défaillant chez les psychopathes. Je dois préciser que j’ai beaucoup entendu ça mais quand j’ai voulu m’en assurer, je n’ai pas trouvé de preuves scientifiques. 

Par contre, on a longtemps cru que ces neurones étaient défaillants chez les personnes souffrant d’autisme car c’est un état dans lequel la socialisation est particulièrement difficile mais ça a été réfuté il n’y a pas longtemps.

Les neurones miroirs au service de l’éducation de nos enfants

Donc si on recentre le sujet sur l’éducation des enfants, on comprend bien que c’est grâce à ces neurones miroirs que nos enfants vont réussir à faire plein de choses comme se laver tout seul, s’habiller tout seul, mettre la table, apprendre plein de choses. 

Et on comprend aussi que c’est en nous imitant que les enfants apprennent. Dès lors, il est primordial de faire attention à notre comportement quand nous sommes avec nos enfants. 

Si on jette les détritus par la fenêtre de la voiture, ils vont le faire aussi. Si nous crions, ils vont crier. Si nous disons des gros mots, ils vont en dire aussi. Mais aussi, si nous restons calmes, ils resteront calmes. Si nous dessinons, ils vont avoir envie de dessiner, si nous jouons au tennis, ils vont avoir envie de jouer au tennis, s’ils voient les copains jouer au foot, ils vont avoir envie de jouer au foot. 

Car oui, ces neurones miroirs fonctionnent avec tout le monde, pas qu’avec les parents. Donc s’ils voient quelqu’un avoir un comportement dans la cour de l’école, dans la rue ou à la télé, ils vont aussi le reproduire. 

Les neurones miroirs et les émotions

On comprend également à quel point nos émotions sont communicantes. Lorsqu’on est agacé, contrarié, en colère, désespéré, mais aussi heureux, gai, souriant, détendu, calme, ils vont avoir la même émotion. C’est la raison pour laquelle lorsque l’ambiance est électrique à la maison, elle a tendance à devenir encore plus électrique. Et inversement, quand l’ambiance est détendue et joyeuse, elle va l’être encore plus. 

Avez-vous déjà essayé de calmer une colère de votre enfant en vous mettant vous-même en colère ? Oui ça peut marcher car si vous avez une réaction tellement intense, l’enfant est stupéfait de votre réaction donc ça le fait passer dans une émotion de surprise, d’incompréhension ou de peur et ça peut désamorcer la crise. Mais, si c’est votre technique, il va falloir toujours aller plus loin dans l’intensité de votre réaction pour stupéfier à chaque fois votre enfant. Parce que, lui crier dessus en disant « calme-toi », ce n’est pas très efficace… La prochaine fois que ça vous arrive, essayez de rester calme, de parler calmement, de ne pas crier, et vous verrez ce que ça donne. C’est d’ailleurs ce que je recommande dans l’épisode 3 de la Boîte à outils des parents qui s’appelle « quand l’enfant fait une crise ».

Que faut-il faire pour éduquer nos enfants en ayant en tête le fonctionnement des neurones miroirs ? 

En ayant un comportement exemplaire. C’est aussi simple que ça. Montrons l’exemple. Ou en tout cas, gardons en tête que nous sommes un exemple pour nos enfants mais aussi pour tout le monde. Mais comme on ne peut pas, à nous tout seul sauver l’humanité, commençons par être le meilleur exemple possible pour nos enfants. Vous êtes un modèle que votre enfant prend pour « argent comptant », sans discernement et inconditionnellement. C’est son parent qui a ce comportement, ça lui suffit. 

Et ce « meilleur exemple » est complètement subjectif. C’est vous et vous seul qui savez ce que ça signifie pour vous. 

Faisons également attention aux autres exemples que peuvent recevoir nos enfants. Alors, on ne peut pas tout maitriser bien sûr. Il y a des fréquentations qu’ils vont avoir et qui ne vont pas nous plaire, on va pouvoir essayer de leur dire qu’il vaudrait mieux qu’ils fréquentent d’autres enfants mais qu’y pouvons-nous vraiment ?

Par contre, une chose que nous pouvons contrôler est l’exposition à des images qui ne sont pas adaptées. Faites attention à ce qu’ils regardent à la télé : toujours des programmes adaptés à leur âge. S’ils voient des images inappropriées, c’est délétère à plusieurs égards car ça peut être choquant, ils peuvent ne pas comprendre ce qu’ils regardent, mal interpréter ce qu’ils voient, etc. Mais, à cause des neurones miroirs, ils risquent en plus de reproduire le comportement inadéquat. Pour en savoir plus sur les écrans, vous pouvez écouter l’épisode 16 de la boite à outils des parents.  

Mais n’oublions pas de nous laisser le droit à l’erreur. Ce n’est pas parce que nous sortons un gros mot une fois ou que nous sortons de nos gonds de façon exceptionnelle que tout est foutu !

Pour résumer : 

On apprend en imitant le comportement (gestes, paroles) des autres. Donc, toute personne offre un modèle, bon ou mauvais. 

Ce qu’on voit est comme vécu et donc ressenti (attention aux images!) 

Les émotions sont « contagieuses ».

coach parental