Episode 88 — Pourquoi les ados aiment-ils prendre des risques ?

Pour cet épisode, je m’appuie principalement sur le livre du Dr Daniel Siegel, Le cerveau de votre ado. J’adore ce que fait le Dr Siegel et je vous avais déjà proposé des épisodes reprenant son travail et celui du Dr Payne Bryson dans les épisodes 51, 52 et 53 consacrés au cerveau de votre enfant, c’est-à-dire de l’enfant de 0 à 12 ans environ. 

Le cerveau de votre ado est consacré aux personnes entre 12 et 24 ans, correspondant à la durée de l’adolescence d’après le Dr Siegel. 

Pour la suite de l’épisode, je vais accorder au féminin, en considérant que vous n’avez que des filles même si je sais que vous avez aussi des garçons. Je fais partie de ce mouvement qui remet en cause le fait que la règle du masculin l’emporte. À ma petite échelle, je participe afin de mettre sur un pied d’égalité le genre féminin et le genre masculin. Ce que, au passage, je n’ai pas à faire dans les autres épisodes lorsque je parle d’enfant, car enfant est un genre neutre. Si le il inclut le elle, pour cet épisode, le elle inclura également le il. 

Une chose que l’on remarque facilement chez les adolescentes est qu’elles prennent des risques comme si elles n’avaient plus la capacité cognitive de se dire que là, non, il vaut mieux ne pas faire ça parce que c’est dangereux. Comme si elles étaient idiotes, comme si elles étaient déconnectées. 

Si bien que la mortalité est trois fois plus élevée pendant cette période que pendant toutes les autres périodes de la vie ! C’est le risque de causes évitables qui explose. L’adolescence est une période de notre vie où nous sommes en bonne santé. C’est le moment pendant lequel nous avons la meilleure santé. Les causes évitables sont les accidents, les suicides, la consommation de drogues et alcool qui peuvent entraîner des séquelles ou des décès. 

Les ados ont un fort attrait pour la nouveauté et questionnent les limites. Elles les repoussent. Cela peut être positif car elles ont une telle créativité, elles pensent en dehors des clous, en dehors de ce qui est déjà connu. C’est la raison pour laquelle il y a beaucoup d’adolescents et d’adolescentes qui font des innovations technologiques et scientifiques. 

Mais ça peut aussi être négatif lorsque, poussées par l’attrait de la nouvelle expérience, elles prennent trop de risques et se mettent en danger. 

Pourquoi les ados aiment-elles tant prendre des risques ? 

La dopamine est un neurotransmetteur, connue comme étant l’hormone du bonheur. Les ados en auraient moins. C’est la raison pour laquelle elles paraissent si molles, si apathiques, si désintéressées de tout. 

Un moyen pour elles de se sentir vivantes, de se sentir exister est de faire monter cette dopamine en faisant des choses nouvelles à tout prix, y compris au prix de se mettre en danger. Lorsqu’elles expérimentent de nouvelles choses, leur cerveau libère plus de dopamine qu’aux autres âges de la vie.

Pour avoir un shot de dopamine, trois moyens : 

  • elles sont impulsives car elles ont un fort besoin de récompense et de récompense immédiate. Elles agissent avant de bien considérer toute la situation incluant, encore une fois, les risques qu’elles encourent. Plus elles vieillissent, plus cette impulsivité est contrôlée ou devrais-je dire contrôlable, car certains adultes ont toujours une grande impulsivité. Je pense notamment aux personnes violentes, qui n’ont pas appris à gérer leurs émotions et à prendre le temps d’évaluer la situation avant d’agir. 
  • elles deviennent dépendantes à cette dopamine qui est libérée principalement par tous les comportements à risques. Elles vont donc être dépendantes de ces comportements à risques, avoir une addiction et aller de plus en plus loin. Une ado qui consomme de l’alcool et qui aime les effets que l’alcool a sur elle va en consommer de plus en plus, quitte à aller jusqu’au black out ou au comaéthylique. Mais il peut aussi s’agir de consommation de drogues, de jeux dangereux impliquant des armes ou mettant sa vie en danger, de conduire sans respecter le code de la route et en mettant en danger les personnes autour, d’avoir un comportement sexuel à risque, c’est-à-dire non protégé, d’avoir un comportement alimentaire nocif tel que l’anorexie, la boulimie, l’obésité. Bref, la liste des comportements addictifs est longue et celle que je dresse n’est pas exhaustive.  
  • elles sont hyperrationnelles c’est-à-dire qu’elles analysent une situation pas du tout dans son ensemble. Elles ne vont voir que leur action immédiate et non les conséquences qu’elle va avoir dans le contexte général. Et puis, dans cette vision très restreinte, les bénéfices d’une action sont toujours plus élevés que les désavantages. Elles vont donc voir tout ce qui peut être cool et excitant à enfreindre une règle sans voir les effets négatifs que la violation de cette règle aura après coup. Là encore, en grandissant, en vieillissant, les ados vont réussir à avoir une vision plus vaste, que l’on appelle substantielle. 

L’idée reçue selon laquelle les ados auraient des comportements débilitants à cause de leurs hormones, de la puberté ou de leurs premiers amours est trop restrictive. La principale cause de ces comportements est la remodélisation de leur cerveau qui est plus large que ce que je viens de vous décrire. Je ferai au moins un épisode sur l’élagage de neurones qui se produit à ce moment-là. 

Comment faire adopter à nos ados un comportement plus sensé ? 

Une fois qu’on a dit tout ça, qu’est-ce qu’on fait ? 

La première chose qu’on attend est que notre ado grandisse ! C’est assez frustrant mais il faut laisser le temps au cerveau de mûrir. Vous n’avez pas d’actions sur ça si ce n’est de faire en sorte qu’il mûrisse de la bonne façon pour vous. Mais c’est comme lorsque votre ado était plus petite. Avant 12 ans, lorsque votre enfant était submergé par ses émotions, vous pouviez l’aider à les gérer au quotidien, vous pouviez l’aider à se calmer, vous pouviez l’aider à mieux le comprendre mais la capacité du cerveau à gérer les émotions en autonomie ne peut se faire que lorsque le cortexpréfrontal est complètement formé, après 25 ans… 

Donc comment pouvez-vous agir pour faire en sorte que votre ado ne se mette pas à risque dans sa recherche de dopamine

Vous pouvez faire plein de choses mais je vous préviens tout de suite, ça peut vous paraître décourageant et épuisant. 

N’abandonnez pas ! Continuez à transmettre à votre ado vos valeurs, continuez à lui dire de participer à la vie de la famille, continuez à être impliqué.e dans sa scolarité, continuez à vouloir rencontrer les personnes qu’elle côtoie… Continuez à faire partie de sa vie et à l’inclure dans votre vie. De cette façon-là, le dialogue sera toujours ouvert et elle pourra vous parler de ce qu’elle vit. 

À cette période de la vie, les réprimandes, les grosses engueulades, les punitions sont totalement inefficaces ! Elles ne l’étaient pas tellement plus jeune, mais encore moins maintenant. Car votre ado va se renfermer sur elle-même, va vous cacher des choses, ne va pas vous parler et c’est tout ce qu’on veut éviter pour faire en sorte qu’elle ne se mette pas en danger. Si vous réagissez de cette façon, peut-être qu’elle va encore plus avoir des comportements à risques pour encore plus repousser les limites.

Au contraire, en ayant en tête que cette recherche de nouveauté induisant des comportements à risques est inévitable à cet âge, la seule chose à faire est d’accompagner votre ado dans cette période de vie. Accompagnez-la en lui demandant ce qu’elle pense de tel ou tel comportement, du sien ou de celui des autres ados qui l’entourent. Vous pourrez lui dire ce que vous attendez d’elle face à telle situation. Elle ne va peut-être pas comprendre sur le moment et agir conformément à ce que vous venez de lui dire, mais ça va rester dans un coin de sa tête. Elle va en prendre note pour plus tard. Le plus tard, on ne sait pas vraiment quand il va arriver… C’est en ça que ça peut être épuisant et décourageant. C’est un travail de tous les jours qui va demander pas mal de répétitions. 

Vous pouvez aussi lui dire que si à un moment elle a besoin de votre aide, elle n’a qu’à vous appeler et vous viendrez l’aider sans dispute ou punition après. 

De cette façon-là, vous serez toujours un roc pour votre enfant, maintenant ado ; vous serez toujours son havre de sécurité, son port d’attache vers qui elle reviendra quand elle en aura besoin. 

L’adolescence est une période de la vie qui est difficile à passer tant pour les parents que pour l’ado en elle-même. Toute la patience que vous avez acquise pendant l’enfance va vous servir à l’adolescence


Cet épisode fait partie du parcours d’écoute consacré aux situations quotidiennes, tout comme les épisodes suivants :


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